Monday, March 28, 2011

There is a crack in everything, that's how the light gets is

Comme Xavier a résumé avec sa verve proverbiale les grands moments de notre périple, j'ajoute ici le texte d'une présentation faite hier à Montréal pour un groupe de méditation, à laquelle je réfléchissais durant notre voyage. La deuxième partie parle directement de notre voyage. Amitiés à chacun, sans oublier le troisième frère.
Jacques

« Il y a une faille en toute chose, c’est ainsi que pénètre la lumière »


Cette phrase, on peut en faire de nombreuses applications, car c’est une vérité d’ordre spirituel, bien sûr, qui nous vient probablement de la Cabbale. Bien souvent, c’est quand un évènement catastrophique, une brisure, se produit dans notre vie, que la lumière apparaît : un décès, un échec, une rupture, un diagnostic médical, ou simplement un changement dans la routine de nos vies, comme un voyage dans un pays complètement différent du nôtre. Autant de chocs qui nous poussent à nous remettre en question, à réévaluer notre vie à la lumière de ce qui compte le plus, après tout.
Et nous devinons déjà que cette vérité spirituelle a quelque chose à voir avec ce qui préoccupe notre groupe, l’œcuménisme, la rencontre des églises divisées, parcourues de failles et de fissures.
Mais il y a plus. Comme c’est souvent le cas avec les très grands artistes, Leonard Cohen a exprimé au moyen de cette phrase une vérité moins évidente que celle que nous lui reconnaissons déjà. C’est une vision très forte de l’histoire, qui rejoint celle de bien d’autres visionnaires et aussi analystes et  théoriciens de notre histoire. Je pense en particulier à la théorie de René Girard sur la violence et le sacré telle qu’il l’a développée dans de nombreux ouvrages, en particulier l’un d’entre eux dont le titre n’est pas sans évoquer lui aussi une irruption de la lumière: Des Choses cachées depuis la fondation du monde[ii]. Je vous propose donc de commencer par le contexte dans lequel Leonard Cohen utilise cet adage spirituel. C’est la chanson  Anthem :          
Hymne
Les oiseaux chantent dès l’aube
Ils recommencent chaque jour
Je les ai entendus.
Ils disent: ne t’attache pas à ce qui est arrivé
Ou  à ce qui est encore à venir.
Ah! On n’a pas fini de faire des guerres
La sainte colombe, elle sera  encore emprisonnée
Achetée et vendue, et encore achetée,
La colombe n’est jamais libre.

(refrain) Que sonnent les cloches qui peuvent encore sonner
Oubliez vos parfaites offrandes
Il y a une faille en toute chose
C’est comme ça que la lumière pénètre.

Nous avons demandé des signes,
Et les signes furent envoyés:
Les naissances avortées
Les mariages gâchés
Et, oui, toutes les veuves des gouvernements,
Des signes que tous peuvent voir.
Je n’en peux plus de marcher parmi cette foule sans lois
Pendant que les tueurs disent leurs prières dans les hauts-lieux.
Ils amassent un terrible orage
Et bientôt ils vont avoir de mes nouvelles.

(refrain) Que sonnent les cloches qui peuvent encore sonner
Oubliez vos parfaites  offrandes
Il y a une faille en toute chose
C’est comme ca que la lumière pénètre.

Vous pouvez ajouter les parties,
Vous n’obtiendrez pas la totalité.
Vous pouvez toujours marcher au pas,
Il n’y a pas de tambour.
Chaque cœur, chaque cœur
Viendra, et il viendra  avec amour,
Mais comme un réfugié.

(refrain) Que sonnent les cloches qui peuvent encore sonner
Oubliez vos parfaites  offrandes
Il y a une faille en toute chose   toute chose
C’est comme ça que la lumière pénètre.

Que sonnent les cloches, invitation à quel(s) rassemblement(s)?
Je ne prétends pas faire une analyse exhaustive d’Anthem,  je voudrais relever seulement quelques éléments.  Contrairement  à d’autres compositions de Cohen, Anthem  est  relativement clair. Il s’agit de la violence humaine sous sa forme la plus extrême, la guerre. Mais le refrain parle de quelque chose d’autre, qui est associé à la violence humaine.  Que sonnent les clochent, c’est l’invitation à se réunir. De quelle sorte d’unité  s’agit-il? C’est là tout l’intérêt de cette chanson : Anthem parle de deux types de rassemblements : le premier, c’est celui de la violence, dont les guerres sont une forme tardive dans l’histoire de l’humanité.  La violence, elle, est présente dès les origines de nos cultures. Pour René Girard, la violence est fondatrice des sociétés humaines. Cela se passe  selon un mécanisme, celui de la victime émissaire,  où, en se propageant de plus en plus, elle finit dans un "tous contre un" qui apporte la paix aux premières communautés humaines. De la répétition de ce "tous contre un", lorsque la violence réapparaît, sort peu à peu le sacrifice, toujours humain au départ. Les divinités archaïques ne sont rien d’autres que des victimes, en quelque sorte transfigurées par la violence qui s’est abattue sur elles.
Le sacrifice archaïque, c’est l’offrande parfaite, car elle unit, ou plutôt elle rassemblait parfaitement  les hommes dans l’unanimité violente contre une victime. Certes, les choses ont bien changé depuis le temps des sacrifices humains sur les hauts-lieux de la Mésopotamie, de la Grèce, du Mont Carmel, ou du Mexique. Cependant, la violence revient toujours nous visiter, et quelquefois avec des parfums de sacré. Même notre religion, en dépit de la non-violence des Évangiles, s’y est associée dans le passé. Les cloches ont souvent sonné pour partir en guerre et il y a peu de temps encore, on bénissait les canons.
Donc, le refrain commence par une allusion à l’unanimité générale et religieuse, sacrée, des ordres sociaux du passé, une unanimité sacrificielle, une harmonie sans faille. Mais le refrain ne la célèbre pas, cette harmonie. Au contraire, le refrain continue en disant que maintenant il faut se débarrasser de nos offrandes parfaites, c’est à dire, se débarrasser du sacrifice, du principe de rassemblement violent, de l’exclusion de l’un par la communauté. Il faut gratter à la surface de l’harmonie sociale, ce que l’on fait dès l’instant que l’on prête attention à la voix des victimes. Et cela ne s’applique pas seulement aux victimes d’un passé lointain, mais à toutes les victimes de toutes les sociétés. Anthem en énumère quelques unes, des enfants avortés aux victimes des guerres, dont les veuves sont les mémoriaux. Et qui les a tués? Les tueurs qui disent leurs prières dans les hauts-lieux : nos modernes sacrificateurs, grand-prêtres des idéologies totalitaires du siècle dernier, autant que  des fanatismes religieux ou de la nation de quelque bord qu'ils soient, ou encore ces experts en systèmes économiques qui justifient le gouffre de plus en plus immenses entre pauvres et riches. Gandhi a dit un jour : La pire forme de violence, aujourd’hui, c’est la pauvreté. A ces cas massifs d’exclusion violente, il faut ajouter nos micro-exclusions quotidiennes, celle qui se passent dans la conversation sur les absents qui ont toujours tort,  objets de jugements, de mépris ou simplement de moqueries, à la chaleur desquelles il est si tentant de se réchauffer, dans une unanimité sans discorde…
Regarder les victimes, quelles qu’elles soient, c’est regarder la vérité en face, c’est donc regarder la lumière. Mais comme c’est en même temps refuser l’harmonie foncée sur ces victimes, c’est créer une faille dans cette harmonie : There is a crack in everything, that’s how the light gets in.
Cohen est très conscient du fait que cette attention portée aux victimes introduit une faille de plus en plus grande dans l’ordre, l’harmonie sociale basé sur la violence : Vous pouvez ajouter les parties, vous n’obtiendrez pas la totalité. Le propre de la violence sacrée, sacrificielle, c’est de changer les parties qui s’affrontent en un tout parfaitement unifié, une harmonie  totale, sans fausse note. Mais nous pensons trop à nos victime, ainsi la totalité sociale reste morcelée, elle se morcelle de plus en plus. Plus moyen de faire marcher tout le monde au pas contre un commun ennemi : vous pouvez marcher au pas, il n’y a pas de tambour.
Or,  si le vieux principe de rassemblement dans la violence et par la violence est détraqué, que nous reste-t-il? C’est là que Cohen est le plus profond. Chaque cœur, chaque cœur viendra, et il viendra avec amour, mais comme un réfugié : au lieu du triomphe de tous contre un adversaire commun, il y a une autre unanimité, une convergence, plutôt, où chacun, au lieu de se fondre dans la totalité du collectif, est et reste, ou mieux encore, devient un individu unique : Chaque cœur, chaque cœur viendra, et il viendra avec amour. Quel est l’objet de cet amour?  Le dernier vers l’indique : comme un réfugié. Aujourd’hui, le réfugié est la figure par excellence de la victime des ordres sociaux et nationaux, et aussi de la mondialisation, du Rom au Japonais. Être comme un réfugié, c’est s’identifier à lui, l’amour ultime. On pense à Simone Weil, à Maximilien Kolbe, et à Marie Skobsova. Le terme de réfugié est aussi loin de tout triomphalisme. On pense plutôt à des réseaux qui émergent sur fond de désagrégation générale, une sorte nouvelle de résistants. Pour eux, le son des cloches n’a plus l’ambigüité du passé. La plupart, d’ailleurs, se sont tues. Que sonnent les cloches qui peuvent encore sonner, dit le refrain. Elles sonnent moins pour rassembler que pour être de simples  rappels. Les premiers mots d’Anthem  disent : ne t’attache pas à ce qui est arrivé ou  à ce qui est encore à venir, aux cycles de l’histoire et de ses violences. Ne te laisses pas emballer par les musiques, les marches du temps sur ton ipod. Le sens nouveau du carillon, serait peut-être, entre autres, celui de la présence, ici est maintenant, à celui ou celle qui est là, comme un réfugié.
La faille et la lumière, une expérience personnelle : Il était une fois deux frères, qui étaient trois
Je reviens du Maroc. Le but du voyage était de reconnecter avec mon frère, après trente ans de relations très espacées.  Nous voulions faire quelque chose qui nous rapproche à nouveau. Lorsque nous nous sommes retrouvés sur les pistes du Sahara, nous avons replongé dans le monde des souvenirs d’enfance comme dans un âge d’or. Nous avons beaucoup ri. Deux autres compagnons de voyage, amis de longue date de mon frère, étaient avec nous, et nous avons formé un groupe formidable, secoués de nombreux fous-rires.  Je n’étais pas loin de les considérer comme des demi-frères, tellement nous étions proches sur nombre de plans.  Un petit microcosme idéal de camaraderie se promenant au soleil du Maroc. Nous avons chanté les chansons de notre adolescence sur la guitare de mon frère. Leonard Cohen, entre autres, bien sûr, et son interprète francophone, Graeme Allwright. Il y avait en particulier une chanson, qui, pour moi du moins,  a symbolisé cette époque de notre adolescence, Johnny[iii]. Johnny c’est une ballade pour un soldat américain en train de mourir au Vietnam. En la chantant, à l’époque, nous nous sentions du bon côté, celui de Johnny, nous-mêmes innocentes victimes pris dans une histoire qui pourrait bien finir en apocalypse nucléaire. C’était les années soixante-dix, dans la lancée des sixties…Mais au Maroc, cette chanson m’est revenue comme un boomerang.  En redécouvrant cette chanson, j’ai revu cette époque de mon adolescence pour ce qu’elle fut en réalité. Notre âge d’or, notre harmonie d’adolescents en bandes, fut d’une certaine façon, une harmonie sacrificielle. Ce qui nous unissait, c’était notre unanimité, avec une bonne partie de notre génération, contre la guerre, qui était en même temps unité contre les tabous, les traditions, les capitalistes, les  gouvernements, les adultes, les profs, les curés, les parents, etc... C’était une unité contre les autres. Dans ma bonne conscience d’alors, finalement,  je condamnais quasiment le monde entier. Si j’ai eu un tel choc en réentendant Johnny, c’est parce que quelque chose s’est passé il y a deux ans. J’ai connu un Johnny. C’était le fils d’un voisin. Il est mort en Irak à 24 ans. Quand j’ai su qu’il s’était enrôlé, je n’ai rien su lui dire. Rien même que la chanson de Graeme Allwright aurait pu me souffler. La chanson Johnny, fut d’abord pour moi un hymne de rassemblement contre. Mais là-bas, au Maroc, elle est devenue Hymne au sens de l’Anthem de Cohen, une  faille dans la bonne conscience de mes souvenirs, par laquelle est entrée un peu de  lumière sur moi-même. Il y a une faille en toute chose, c’est ainsi que la lumière pénètre.
Notre voyage au Maroc fut marqué par une autre expérience, cette fois entre mon frère et moi-même. Peut-être à cause de l’âge, nous avons accepté de reconnaitre les petits torts que nous avions l’un envers l’autre, et nous en avons bien ri. Nous avons ri au souvenir de certaines punitions qui n’étaient pas tombées sur le vrai coupable, et à comment nous manipulions pour cela  nos parents. Nous avons ri au souvenir des vantardises d’un aîné auxquelles le cadet avait cru dur comme fer…
Mais aussi et surtout, nous avons parlé d’un autre sujet, nous avons ouvert une autre faille dans l’âge d’or de notre adolescence. Quand nous parlions, pour nous, il y avait deux frères, extrêmement unis dans nos idées, nos projets, nos escapades, nos bêtises, nos goûts en général. Mais en réalité, nous étions trois. Le troisième frère était le plus jeune. Lorsque nous étions enfants, il est arrivé  trop tard pour participer à nos jeux et à nos secrets. Et lorsque nous sommes devenus des adolescents, puis des adultes, nous l’avons ignoré, dans les deux sens du terme. Nous étions cyniques, rigolards, pleins de désirs et de passions. Lui a toujours été différent, plus candide, chaleureux et gentil que nous. Nous n’avons pas été des frères pour lui. Notre harmonie fraternelle a eu elle aussi son exclu.  Enfants et adolescents, nous ne l’avons pas exclu activement, violemment, mais par notre indifférence. Devenus adultes, c’était un rituel fraternel des deux aînés, lors des rares réunions de famille, de le taquiner publiquement. Il n’avait pas pu venir au Maroc, et je puis dire que pour la première fois, il m’a manqué, il nous a manqué. Notre réunion au Maroc, aussi chaleureuse et joyeuse fut-elle, avait une faille, et nous avons pu en parler. Par cette faille un peu de lumière est passée, qui a éclairé un visage dont nous nous étions détournés, trop absorbés par nous-mêmes. La prochaine fois, il faut qu’il soit du voyage et nous aurons beaucoup de choses à nous dire…Inch Allah !
De quoi avons-nous parlé ?
Pour finir, je suis un prêtre orthodoxe, et pourtant je ne vous ai pas parlé de la façon à laquelle on s’attend en général, avec ce type d’intervenant. Je n’ai pas parlé le langage de la  théologie, même pas parlé de Dieu, et je n’ai pas saupoudré mes phrases de termes grecs ou slavons. J’aurais pu le faire, cinq années d’études en théologie, ca laisse des séquelles. Non que la théologie et une bonne terminologie ne soient pas importantes, elles le sont, bien sûr, dans leur contexte propre. Mais si je m’étais présenté a vous de la façon traditionnelle, j’aurais projeté une image classique, celle d’une harmonie  sacrée, celle des concepts et des termes, celle de la beauté paisible de nos liturgies. Or, en faisant cela, j’aurais maintenu une distance entre vous et moi. J’aurais préservé ma zone de confort, comme on dit en anglais, et ce faisant, j’aurais entretenu la différence et donc des divisions, celles de nos églises et de leurs histoires. Celle de leurs exclusions mutuelles. Au fonds, J’aurais parlé depuis l’harmonie du sacré, toujours un peu sacrificielle, car basée sur une exclusion. Et, de toute évidence, j’aurais montré n’avoir rien compris au message d’Anthem. Chaque cœur viendra, mais comme un réfugié. Si nous nous intéressons les uns aux autres, chrétiens d’églises diverses, c’est précisément parce que nous regardons la faille, et qui est dans la faille, l’autre qui est exclu. Et en nous regardant les uns les autres, à travers toutes les failles de l’histoire, nous voyons Celui qui est exclu chaque fois que nous excluons, et nous pouvons le nommer, Jésus le crucifié, et Jésus le ressuscité: dans la faille du tombeau a jailli la lumière.
J’aimerai avoir quelque chose à vous dire sur comment réunir nos églises, quelques bons conseils pratiques, mais je n’en ai pas d’autre que celui-ci: regarder dans nos failles, personnelles et collectives, et ceux qui en souffrent, et, d’une certaine manière, je ne sais pas exactement comment, la lumière se fera. Je suis aussi prêt à gager que l’unité ne ressemblera pas à celle que nous attendons. Les cœurs aimant viendront, comme des réfugiés. Ce ne sera pas un jour de gloire selon les critères humains.
Plutôt que l’emphase, l’apophase
Lorsque j’étais au Maroc, j’ai fait une autre expérience sur laquelle je vous laisserai. Il y avait quelque chose d’étrange dans tous ces villages loin des sentiers battus que nous avons traversés. Une absence. Pas de clocher. Pas d’église. Seulement, et pas toujours, un minaret. Je me suis senti en terre très étrangère. En même temps, par la rencontre avec les personnes, nos guides et les hôtes des divers camps ou nous passions la nuit, ce fut, un petit peu,  la découverte d’un Islam loin de ses caricatures fondamentalistes violentes, un Islam ancré dans les gestes simples de  la vie quotidienne, comme se saluer et conclure tout projet, toute référence au futur, par « si Dieu le veut», Inch Allah. J’y étais  à l’aise, et en même temps, très conscient de l’impossibilité de communiquer cela avec mes hôtes sans tomber immédiatement dans les pièges de ce genre de dialogue, qui évolue toujours entre, d’un coté, ‘on a tous le même dieu’, et, à l’autre extrême : ‘attention, ce n’est pas la même chose’… J’ai pensé alors à Charles de Foucault, et à une phrase d’Olivier Clément, qui l’un et l’autre expriment, l’un par sa vie, l’autre par sa pensée, que la rencontre avec une autre religion est vouée à l’échec, au niveau des concepts et des accords de principe, si elle n'est pas d’abord, pour nous chrétiens, la prise de conscience que « le christianisme n’est pas une religion en série avec les autres , c’est la profondeur de la vie.» Il y a une façon d’approcher Dieu dans la profondeur de la vie, qui est parallèle à celle du dogme et de la théologie, qui les complète ou plutôt en fait éclater les limites. Les théologiens, bien sûr, n’ont pas pu s’empêcher de lui donner un nom, c'est la voie apophatique, ou encore la théologie « négative ». Je vous laisse sur l’une de ses plus hautes expressions, la prière d’un de nos pères dans la foi, qui est comme un rayon de lumière dans la faille de toutes nos différences, quelles qu’elles soient, et d'une nudité conceptuelle qui rappelle les dunes du Sahara :
Ô Toi l’au-delà de tout,
Comment t’appeler d’un autre nom ?
Quelle hymne peut te chanter ?
aucun mot ne t’exprime.
Quel esprit te saisir ?
nulle intelligence ne te conçoit.
Seul, tu es ineffable ;
tout ce qui se dit est sorti de toi.
Seul, tu es inconnaissable ;
tout ce qui se pense est sorti de toi.
Tous les êtres te célèbrent,
ceux qui te parlent et ceux qui sont muets.
Tous les êtres te rendent hommage,
ceux qui pensent
comme ceux qui ne pensent pas.
L’universel désir, le gémissement de tous
aspire vers toi.
Tout ce qui existe te prie
et vers toi tout être qui sait lire ton univers
fait monter un hymne de silence.
Tout ce qui demeure, demeure en toi seul.
Le mouvement de l’univers déferle en toi.
De tous les êtres tu es la fin,
tu es unique.
Tu es chacun et tu n’es aucun.
Tu n’es pas un être seul, tu n’es pas l’ensemble :
Tu as tous les noms,
comment t’appellerais-je ?
Toi, le seul qu’on ne peut nommer ;
quel esprit céleste pourra pénétrer les nuées
qui voilent le ciel lui-même ?
Aie pitié, ô Toi, l’au-delà de tout ;
comment t’appeler d’un autre nom ?

Grégoire de Naziance[iv]



[i] Cohen, Leonard, Anthem, in The Future, Sony Music Entertainment, 1992
[ii] Girard, Rene, Des Choses cachees depuis la foundation du monde, Grasset, 1978.
[iii] Allwright, Graeme, Johnny, in Joue, joue, joue, Mercury, 1966.
[iv] In Sources, les mystiques chretiens des origines. Olivier Clement. Desclee de Brouwer, 2008. P. 21


Sunday, March 13, 2011

Mes amis, mes frères

Mes amis, mes frères,
Rarement je n’ai été moins seul que dans ce désert avec vous. Tu verras « le désert est un lieu magique, où les sens sont exacerbés : le silence, le soleil, les paysages … désertiques, une rencontre avec soi ».  Ma réalité est que cette rencontre je l’ai vécu à travers vous. Vous ne vous connaissiez pas, ou peu, entre vous. Toi, mon frère exilé, dont je n’ai jamais fait le deuil du départ, de la fuite, en 1975, tu me manques et je t’en veux toujours au point  de t’oublier au quotidien. Toi, mon beau-frère, exilé en France comme Jacques l’est aux Etats-Unis, ni tout à fait français, ni tout à fait Algérien, mon compagnon de pupitre, mon ami, mon confident, ma référence, mon frère ; toi, mon Philippe, complice de tous les jours depuis 28 ans, fidèle en amitié  jusqu’à la mauvaise foi caractérisée, jusqu’à me dire « tu as raison, c’est exactement ça qu’il fallait faire » même quand j’ai manifestement tort ; toi, mon frère, mon rire.

Ca y’est, j’entends déjà vos sarcasmes « plus égocentrique, c’est pas possible » et « tu trouves encore le moyen de tout ramener à toi ».  Et pourtant, je récidive …Ce que j’ai appris dans cette semaine. Voyage anthropologique, religions, humanisme, sauvagerie, économie,  la jeunesse, la vieillesse, la mort, l’amour, la monogamie, la polygamie, la générosité … nos conversations à deux, à trois à quatre, nos silences, une communication permanente, de jour comme de nuit, une semaine onirique ou s’est mêlé le dit et le non dit, le jour et la nuit, les rêves et nos réalités.

Une certitude, le propre de l’homme est que sa communication passe par le rire, quand il est porteur de bonté et de générosité; il permet de tout dire, de tout (faire) comprendre, de tout faire accepter ; la technologie est au service de la communication entre les hommes, donc la technologie est au service du rire !. Jacques, le pope orthodoxe qui vit aux confins des forêts du grand nord Américain, skyppe en vidéo Brigitte réduisant à zéro l’espace-temps. De désert à désert, Philippe se désangoisse en appelant « madame Nénette » 4 fois par jour, elle est partie de son côté en Jordanie … Hafid qui vit 8 mois par an dans le désert et n’a jamais quitté le Maroc nous sort le dernier Blackberry, qu’il recharge sur une batterie de voiture faute d’électricité dans le camp, et nous fait écouter un chanteur qu’il croit Algérien car répondant au patronyme « ni-aznavour-brelouferré » car il clame « je suis ni Aznavour, Brel ou Ferré ». J’appelle Djo pour lui faire partager notre bonheur et joie. Quelques jours avant, j’évoquais que nous étions passé de l’ère du cru - le nomadisme -, puis à l’ère du cuit (sédentarisation et organisation de la société) pour entrer dans l’ère du portable ou l’ubiquité, partout en même temps,  est la nouvelle réalité. Je ne croyais pas le vivre de façon aussi prégnante … la magie réelle du désert.

Nés dans la France des années 50 ou dans une Algérie récemment indépendante, rien ne nous prédisposait à afficher fièrement notre citoyenneté du monde en représentant à travers nos femmes et enfants 8 nationalités : Française, Américaine, Algérienne, Belge, Hongroise,  Israélienne, Canadienne, Portugaise… et peut être Coréenne du Sud l’année prochaine si Benoit et Djin concrétisent leur projet d’union. Les premiers petits enfants de Jacques, qui naitront au plus tard le 17 mars, des jumeaux, ne parleront vraisemblablement pas le français : André est américain, Vanessa est Portugaise. Elle est loin l’époque où nous convolions à moins de 5 km de notre lieu de naissance. Nous avons, sauf Sid Ahmed qui est né à 10 jours près en même temps que Laurent, nettement plus de 50 ans et nous sentons jeune. L’homme prolongé par son hygiène de vie et un travail moins pénible, l’homme réparé quand quelque chose ne marche plus (plus de 30 fois pour moi, et Philippe comme moi passons sur le billard dans les 3 semaines qui viennent), l’homme peut être bientôt génétiquement modifié… nos petits enfants connaitront-ils « l’homme  allongé » où la mort deviendrait optionnelle ?

Philippe raconte l’adoption de Benjamin et d’Alexandra à Jacques, comment Benjamin l’ainé est devenu le cadet, les difficultés d’espaces et de temps qu’ils ont rencontrés, leurs souffrances d’enfants et de parents. Jacques raconte Grégoire, l’impuissance apparente à le sortir de la drogue et de l’alcool, leur souffrance d’enfant et de parents ; sa lente mais sûre résurrection, sa certitude qu’au-delà de la mort il y a la vie.

Les religions, ou plus exactement les cultes, nous ont rappelés la complexité des organisations humaines quant elles touchent au divin. Pour Sid Ahmed, l’absence de clergé dans la religion musulmane, est source de bien des excès faute d’un ordre séculier organisé facilitant ainsi tous les débordements individuels au nom de Dieu, au point qu’une religion puisse être assimilée à la violence. Pour Jacques, historien passionné des religions, l’église catholique romaine s’est sclérosée depuis le 9ieme siècle en imposant, pour des raisons économiques, un célibat aux moines puis aux prêtres avec une hypocrisie bien catho ou le vœu de célibat n’est pas celui de chasteté, ni de pauvreté, qui restent imposés aux moines. Faute d’avoir su aider matériellement les hommes sur terre, le dernier dogme en cours depuis Vatican 2 est un principe de non-ingérence ; l’Eglise est riche, le clergé est pauvre et l’idée même d’un fonds souverain catholique est irrecevable. « Mmmêêêêê, il n’y a pas de mmêêêê » nous explique Philippe dans un éclat de ce rire formidable et communicatif en expliquant à Naïma, notre hôtesse dans un Ryad « qu’elle est bien agréable de son visage et de toutes les composantes de sa personnalité » et qu’il est dans la chambre baptisée Olivier. Elle a 25 ans et pense que nous sommes déjà  la retraite… rires angoissés.. Jacques nous explique que dans la grande majorité des religions chrétiennes, la majorité des dogmes sont apparus au cours des siècles, généralement pour des raisons économiques, à commencer par la monogamie qui n’est apparue en Europe qu’à la fin du moyen âge ; une approbation implicite ? Au moins deux heures pour arriver à la conclusion qu’une épouse à la fois c’est déjà suffisamment difficile ! C’est pas tout ça, mais il est l’heure d’aller se faire masser.

Kadhafi bombarde son peuple, Jacques par son application France 24 sur Iphone nous rappelle la sauvagerie humaine. En réduisant en quelque sorte la barbarie à l’extermination du peuple juif, je regrette que la mémoire de la Shoa s’est, bien involontairement, appropriée  le nazisme ce qui finalement rassure de manière subliminale les occidentaux sur le niveau élevé de leur civilisation par rapport aux barbares. La sauvagerie, la cruauté guette chacun d’entre nous, elle est indépendante de notre degré de civilisation. Si nous acceptions mieux cette réalité nous éviterions peut être des conflits, des jugements racistes, issus d’un occident dégageant cette puanteur d’insupportable suprématie. Pour Jacques, ça y’est je suis prêt à lire du René Girard, la violence et le sacré !

De mondialisateur à mondialisé, vous n’échappez pas à ma théorie du changement de paradigme, de l’Atlantique au Pacifique… des délocalisations créatrices de richesses sans précédents dans les pays émergents qui sortent de la pauvreté … et qui paupérisent une partie de l’occident. De la délocalisation de 10 à 15% de la production occidentale qui se traduit par des déficits publics d’ampleurs comparables faute d’une capacité à recréer une richesse nationale comme à procéder à une politique de redistribution entre bénéficiaires et victimes de la mondialisation. Les écarts de niveau de vie à l’intérieur des pays vont croissants : les riches sont de plus en plus riches et trouvent insupportables de payer autant d’impôts, les pauvres vivent de plus en plus mal, d’autant que la valeur unique est devenue l’argent et la consommation. La planète, dans un monde globalisé ou l’information est totale et immédiate, est à la limite de l’explosion sociale ; la révolution face book est en marche et a un parfum de Jasmin.

Nos nuits sont très hachées … car il fait froid sous les tentes dans le désert ; les bouillottes sous les lourdes couettes jouent leur rôle ; le vent est onirique, dormons nous ?

Les indices… hédoniques, de transactions répétées, de capitalisation, équi-pondérés, efficients, géographiques, sectoriels, de bien-être… mais comment vais-je faire pour avoir l’air intelligent devant ce frère qui ne me juge pas. Alors, le débat s’anime. Il commence facilement avec l’indice « big mac »,  bien de consommation universel, aux composants de biens et services invariants et mondialisés et qui permet ainsi de juger la Parité de Pouvoir d’Achat des monnaies. Sympa mais pas très puissant me renvoient mes compères. J’élabore alors sur l’indice Coca-Cola utilisé par l’OMS comme critère simple et efficace : là où le Coca-cola n’est pas distribué la pauvreté est extrême, la marginalisation est forte, les enfants souffrent de dénutrition et de déficience en médicaments, il ne fait pas bon vivre. Pour Jacques et Sid Ahmed, l’étude a été sponsorisée… par Coca-Cola ; quand on sait que le budget annuel de communication de Coca Cola est de 100 milliards de dollars, l’hypothèse n’est pas forcément infondée, la démocratie pèse peu en regard du chiffre d’affaires. Il me reste à frapper fort : l’indice du slip ! L’attention est totale.. et après 1 heure de rires sur le contenu du slip… je peux expliquer comment Greenspan suivait l’évolution de l’indice de ventes, pour ne pas dire de consommation, de slips aux US comme indicateur avancé (sic) et majeur (re-sic) de la croissance économique américaine. Attention, il ne marche que pour la consommation pour les hommes, les sous-vêtements féminins ne sont pas sensibles à la conjoncture des bourses !

S’ensuit une longue discussion… sur la prostate… dont le seul bénéfice a été qu’elle nous a permis à tous les quatre de contempler comme jamais la voie lactée et ses étoiles qui n’en finissent pas de filer…

Hafid, notre guide au camp des dunes. Ne pas échanger, même un regard, est la seule solution que nous avons trouvé pour ne pas exploser de rire quand il nous raconte la vie des dromadaires qui « est un quadrupède vivant dans le désert ». Sid Ahmed et Philippe ont été exemplaires dans leurs questions : quel poids, à vide ou plein d’eau ? Quelle autonomie ? Pourquoi dit-on de quelqu’un que c’est un chameau quand il est méchant ? Le chalumeau est-il un dromaludaire à deux bosses ? La vie du Fennec a aussi occupé une partie de nos rires, ainsi que sa chasse nocturne à la lampe de poche qui fait briller ses yeux.

Notre jeunesse, celle de Jacques et la mienne, a été omniprésente. Gervaise a fait un retour singulier au devant de la scène ; Philippe l’a adopté comme mascotte. Très proches, nous avions pratiquement tout partagé, y compris Gervaise. Nos perceptions sur nos parents, sur ce que nous avons vécu enfants sont cependant souvent très différentes. Différence d’âge, de sensibilité, de comportements des parents ? Jacques s’interroge toujours sur les raisons qui m’ont éloigné de nos parents, alors que ma mère venait me voir tous les jours à l’hôpital ; alors que c’est peut être pour cela que je ne pouvais plus la supporter physiquement. Je m’interroge toujours sur les raisons de sa fuite dans sa communauté alors qu’elles sont évidentes pour lui. Il culpabilise de n’être pas souvent venu me voir à l’hôpital en 1973 ; je lui explique que je m’en foutais car je vivais dans un univers parallèle pour contourner la souffrance et la mort. Par contre, je lui explique que je lui en veux d’être parti et d’avoir cassé notre projet de vie communautaire avec Eric. Nous regrettons notre attitude historique envers notre petit frère, dont Jacques est aujourd’hui finalement plus en contact que moi. Je reconnais beaucoup de mes méfaits : c’est bien moi qui est coincé son pied dans la cage d’ascenseur à Sceaux en 1964 ; oui, je lui ai volé l’argent de sa tirelire avec un trombone. Oui dans nos bagarres je mettais la tête devant pour qu’il se fasse engueuler par notre mère qui acceptait tous nos combats « sauf sur la tête ». Jacques reconnaît qu’il était beaucoup plus doué pour le faire-savoir que le savoir-faire : finalement très peu de joints et peu de conquêtes féminines. Il paraît qu’Eric craignait que je lui pique les rares filles qu’il arrivait à choper.

La guitare emportée en voyage n’a été capable que de jouer des airs de notre adolescence : Graeme Allwright, Leonard Cohen, un peu de Brassens, les Moody blues, days of spearly spencer, Michelle, And I love her… Rien de plus récent ne me revenait dans les doigts. Graeme Allwright fut un sujet de différent historique entre nous; mais j’en suis sûr, c’est bien en 1967 à la maison des jeunes de la Bourboule que nous l’avons découvert et non pas en 1969 chez Isabelle Empereur-Bissonnet, voisine et complice de Jacques au 5° étage du passage Duguesclin.  Je chante « Johnny », la guerre du Vietnam, dans les dunes la nuit, chanson tirée de cet album mythique illustré par la photo en noir et blanc de Graeme Allwright jouant de la cithare. Jacques ne la supporte plus car elle lui évoque deux jeunes de son village partis se faire tuer en Irak sans savoir pourquoi, ils ne cherchaient pas la gloire et avaient peut être seulement du mal à jouer le jeu dans leur petite ville sans histoire. La cause n’était pas juste et il ne fallait pas vaincre à tout prix.

La Rochefoucauld où, comme ma Clémence d’amour, nous avons fait toutes nos études jusqu’au bac. Il y était mal, j’y étais plutôt bien et au concours du plus traumatisé des deux on ne sait pas qui gagnerait in fine. Roturiers, de famille anonyme, sans « green dollars », nous étions tels des émigrés dans un monde qui nous tolérait. J’ai raconté à Jacques mon déjeuner récent de la promo 1975 où comment, au bout d’une heure, les « de quelque chose» se retrouvaient ensemble et les autres, finalement pas si minoritaires que cela, comparaient leurs difficultés de l’époque à survivre dans ce milieu. L’un est devenu chanteur d’opéra, l’autre tellement effacé qu’il consacre sa vie à la conservation des négatifs depuis les daguerrotipes, très inquiet qu’un jour on puisse seulement lui demander de s’occuper des positifs. Cette école m’a autant marqué que l’hôpital. Ma rage de vivre, de ne pas accepter de tutelle, de réussir professionnellement, cette difficulté à vivre le « ici et maintenant », je la dois à cette école, cet accident en 1973, mes parents.

La Cigogne qui s’est encastrée dans la gouverne de l’avion qui se posait à Ouarzazate nous a permis de retrouver Ibrahim et son 4x4 et de prolonger de 24 heures notre voyage par une magnifique traversée de l’Atlas. Sur l’air de Michael est de retour et l’œil surpris du portier du Berbère Palace (rebaptisé bien évidemment le Berbère Salace), nous  entamons « Ibrahim est de retour Inch Allah ». Philippe lui a tout appris à Ibrahim au cours de ces 5 jours : rire avec nous, nous faire rire, la leçon de conduite dans les dunes qui se termine par Philippe qui lui remet solennellement son papier rose.

La cigogne fut un grand moment où la personnalité de chacun s’est de nouveau révélée : Jacques, pour qui un retard est professionnellement catastrophique le prend avec une grande sérénité ; Philippe en profite pour déclarer à la cantonade qu’il est vétérinaire et s’il « peut faire quelque chose pour la cigogne, c’est le moment » ; quand le personnel de la RAM annonce que « si l’avion est réparé demain, il redécollera, Inch Allah », il fait éclater de rire les 120 passagers et le personnel de la RAM par un « j’aimerai revenir une seconde sur le Inch Allah » ; je retrouve ma grande nervosité face à une situation que je ne maitrise pas totalement et dans un contexte de transport (pour qui a déjà voyagé avec moi, vous voyez) ; Sid Ahmed, très philosophe, profite de ce rab de vacances imposé ; Inch Allah.

Que retiendrons nous de ce moment hors du temps : une chaleur entre nous. Xavier qui pousse du coude Philippe pour prendre les mêmes photos que lui alors que nous sommes seuls à plusieurs kilomètres à la ronde ; la guitare la nuit dans les dunes ; les ombres portées dans les dunes au coucher de soleil ; la recherche de réseaux cellulaires dans le désert par Jacques et Philippe ; la bouillote chaude ; nos souvenirs fraternels d’enfance ; les 60 ans dont nous gratifiait Naima dont le visage était aussi agréable que toutes les composantes de sa personnalité ; les étoiles filantes … je ne sais pas, mais en tout cas, personne n’oubliera Philippe quand il a dit au serveur en me désignant : « le vin, c’est madame qui goûte ».

Merci